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10 mars 2009

Melting pot inside...

WatchmenWATCHMEN était l'un des films les plus attendus de ce début d'année 2009. Le roman graphique d'Alan Moore et Dave Gibbons est une référence; qu'en est-il du film? Adapter une oeuvre aussi dense et jusqu'au boutiste dans son propos était un pari extrêmement risqué; on pouvait craindre que les deux studios associés pour l'occasion (Paramount et Warner Bros.) demandent à Zack Snyder et ses scénaristes d'édulcorer le sujet pour livrer un blockbuster inoffensif. Fort heureusement, il n'en est rien car le cinéaste a respecté le matériau d'origine avec une totale intégrité. Le pitch de départ est simple: dans une Amérique alternative où Nixon a été réélu pour la 5ème fois grâce notamment à la victoire des Etats-Unis au Vietnam, mais où la menace d'une guerre nucléaire est permanente, des justiciers pour la plupart masqués, les Watchmen, ont dû cesser leur combat suite à une loi rendant illégales leurs actions. Lorsque l'un d'entre eux, le Comédien, est retrouvé assassiné, ses anciens amis mènent l'enquête et découvrent une conspiration dépassant l'entendement. A partir de cette trame, Zack Snyder construit un film labyrinthe où le passé et le présent s'entrechoquent perpétuellement et où les héros sont tous des êtres torturés et partagés entre le Bien et le Mal, qu'il s'agisse du Comédien qui pousse à l'extrême ces deux concepts, de Rorschach le misanthrope ultra-violent ou encore, du docteur Manhattan, homme nucléaire dont la puissance suprême représente une perpétuelle menace. L'histoire originale d'Alan Moore dresse également le portrait d'une société américaine corrompue par l'argent, le sexe, l'extrêmisme politique et les inégalités sociales, portrait qui trouve une raisonnance logique en ces années 2000 et les excès des gens de pouvoir. Le film comporte beaucoup de dialogues, le réalisateur prenant le temps de présenter les personnages et de faire évoluer leurs relations avec beaucoup de rigueur. La résolution de l'intrigue n'a vraiment lieu que dans le dernier tiers du métrage, l'intéret d'Alan Moore comme de Zack Snyder se situant dans l'exploration de l'âme torturée de ses héros désabusés. Cependant, le film comporte sa part de scènes d'action spectaculaires et offre aussi et surtout un spectacle visuel éblouissant. Le casting n'est pas en reste, mention spéciale à Billy Crudup dans le rôle du docteur Manhattan qui, sous les capteurs à effets spéciaux, insuffle toute l'âme à son personnage, et à Jackie Earle Haley campant un sensationnel Rorshach.

WATCHMEN_BOFEt la musique, puisque c'est tout de même de cela que nous parlons sur Trackzone... Pour revenir aux compositions originales de Tyler Bates qui ont déjà fait l'objet d'une première écoute hors film, l'opinion de votre serviteur est malheureusement confirmée: le camarade de jeu de Zack Snyder n'a pas réussi à se hisser au niveau d'excellence du récit filmique. Privilégiant le sound-design en lieu et place de motifs mélodiques et ne prenant quasiment aucune distance avec les musiques temporaires (les principales étant le  BLADE RUNNER de Vangelis, la trilogie MATRIX de Don Davis pour les dissonances de cuivres et les choeurs, Philip Glass pour les moments élégiaques), Bates se contente d'illustrer sans conviction les séquences sur lesquelles on lui a demandé de travailler. Jamais sa musique ne grandit la mise en scène et elle manque par une fois de la plomber sur une séquence à cause d'un effet de manche cuivré des plus ridicules (la tentatie d'assassinat sur l'un des Watchmen). On parlera de platitude à l'image et d'ennui en écoute hors film, à l'exception d'un ou deux passages à la guitare du plus bel effet (sur le final notamment), ce qui est peu. Ce qui fait la force de la bande musicale, c'est le mélange du travail de Tyler Bates avec de nombreux morceaux pré-enregistrés. C'est ainsi que le film est parsemé de nombreux standards: ceux de Bob Dylan tout d'abord, en version originale ("The Times They Are A Changin'" illustrant le générique d'ouverture qui est un modèle de concision et de créativité visuelle) ou réarrangées ("All Along The Watchtower" par Jimi Hendrix et "Desolation Row" par My Chemical Romance"), mais aussi Nat King Cole et son "Unforgeattable" habilement employé en contrepoint de l'action en cours, le "Sounds of Silence" de Simon & Garfunkel ou le "Hallejulah" de Léonard Cohen, élevant (au sens propre comme au figuré) une scène d'amour très charnelle. Mais l'idée de génie de Zack Snyder réside dans l'emploi de deux morceaux de Philip Glass pour le film KOYAANISQATSI ("Pruit Igoe" et "Prophecies") lors du montage parallèle entre l'exil du docteur Manhattan sur Mars et les origines du personnage. La symbiose musique/image est parfaite, en ce qu'elle cerne avec intelligence et talent la destinée tragique et la mélancolie du savant devenu surhomme malgré lui. Cela faisait longtemps que l'on avait vu une telle interaction qui, à regret, n'incombe pas à Tyler Bates. On se prend à rêver que Philip Glass ait composé toute la musique du film. Peut-être cela arrivera t-il dans une réalité alternée... En attendant,il est permis d'apprécier l'ensemble de la bande originale dans le film, à défaut d'une écoute captivante hors film. Warner Sunset/Reprise Records a édité 2 albums (l'un pour les chansons et le morceau de Philip Glass regroupant les 2 titres de KOYAANISQATSI, l'autre pour la musique de Tyler Bates), là où un coffret regroupant les deux aurait été le plus adapté pour fixer sur galette le panorama complet de la bande sonore. Rorschach aurait pu dire: "Les majors ont peur de moi. J'ai vu leur vrai visage". A méditer...

Raphaël Tchelebi

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